Une pure journée "Gravel"


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Elle s’annonçait un peu délicate, cette étape : 130 Kilomètres et un temps orageux à l’arrivée, dans une ville touchée récemment par les fortes pluies qui inondent une large zone autour de Tokyo depuis quelques semaines, tout ça avec quelques nausées et maux de tête au réveil pour moi… fallait pas mollir. Heureusement les copains m’avaient dit « oui mais t’inquiète pas, on commence par 13km de descente ». Bon avec des réconforts pareils c’est sûr, tu peux ne pas rester au lit.

Tout se passe idéalement jusqu’au km 80. On s’arrête dans un petit restau sympa au bord de la route pour un bon repas réparateur. Les copains du cuisinier reviennent d’une belle cueillette de champignons. On est encore dans la préfecture de Fukushima, mais ça ne semble pas leur poser de problèmes de ramasser des kilos de grosses espèces colorées (violets, jaunes), ou d’un blanc éclatant. On dit pourtant bien que les champignons concentrent la radio-activité… peut-être pas celle d’ici, ou peut-être qu’à une centaine de kilomètres du lieu de la catastrophe, elle est aujourd’hui insignifiante.

Au dehors, quelques gouttes tombent de manière éparse, mais l’orage annoncé n’est pas là.

On sort de table, et comme d’habitude on va discuter un peu avec le propriétaire du lieu qui nous demande où l’on va : « Nikko » qu’on lui dit, donc, puisque c’est là qu’on va.

Et là comme chaque jour il se passe quelque chose de pas anodin : dans une attitude sévère il met ses bras en croix. .. Comme pour dire que non… Nikko, ça ne passe pas !

C’est bien de ce petit moment où tout d’un coup l’avenir de notre journée est devenu incertain, dont nous nous rappellerons longtemps.

Bon on y va quand même parce que d’une part, on n’a pas le choix, et d’autre part, on croit comprendre qu’il y aura plus loin plusieurs solutions pour s’y rendre, à Nikko. Et puis le Professor confirme qu’il y a plusieurs routes.

On remonte donc sur nos bécanes : 14h il commence à faire nuit, c’est quand même bizarre.

Après seulement quelques kilomètres, on arrive au premier barrage routier : une déviation est indiquée obligatoire pour tout véhicule.  Pour nous en convaincre, on demande à l’autochtone si « à vélo, en bricolant un peu, on pourrait pas y passer quand même par la route barrée… »

L’autochtone dit peut-être bien « peut-être »… mais avec un air bizarre : la même tête sûrement que lorsqu’il est dans ses toilettes et qu’il a trop mangé de bon riz. .. Une tête qui dit que « peut être que ça passe » mais qu’on va en ch…

Du coup on y va (oui parce que la déviation proposée à l’air de monter… faut pas déconner nous on veut descendre). A partir de là on découvre un paysage dévasté et une route couverte de boue, de gravats, trempés. .. Un lac couvert de troncs arrachés à la forêt.  Des pans entiers de pins arrachés comme des mikados. Des traces de boue sur les arbres à 3m au-dessus du niveau actuel sûrement très haut déjà. On a l’impression d’être envoyés spéciaux sur terrain dévasté.

Mais on roule.

Une dernière fois on nous détourne vers la montagne au lieu de plonger via un tunnel sur la ville qui semble pourtant proche.

Ensuite, plus de répits… ça monte. Ce coup-ci la nuit tombe pour de vrai. On croise une tribu d’une bonne dizaine de singes dans un secteur bien perdu à la tombée du jour, puis on arrive au col. On se change pensant basculer enfin vers l’arrivée. Et puis non ça remonte. Ça n’en finit pas. Un col. L’arrivée de cette montée infinie ?
Non la route sur Nikko est encore barrée !  Il faut continuer de monter. Encore 5 km entre 8 et 10%. Arrivée en haut 1450m, il fait nuit noire.

On se change car on est trempés. Tout au fond de la vallée on voit Nikko illuminée. Elle me paraît incroyablement loin. On a entendu en montant des sifflements de rapaces de singes et parfois on aurait pu croiser un ours… On ne sait pas pourquoi cette route monte jusque-là. .. On a cru 3 ou 5 fois être en haut mais jamais on y arrivait. C’était interminable.

IMG_0531Bref 18h30 il fait nuit noire on bascule dans la descente. Un camion nous double, je n’ai pas de phare avant mais je ne peux pas résister,  je saute dans sa roue et je laisse les copains s’éclairer à la frontale de Francis.

La descente se fait à bloc, un camion devant et un autre derrière qui m’allume la route. On descend un peu à « tombeau ouvert » mais c’était ça ou se geler à suivre Francis.

Arrivée en bas détendu et content de mon choix. Les compères me rejoignent il reste que 2 km pour rejoindre la guest house extra sympa d’où j’écris ce billet.

Il est 19h quand nous posons les sacs.

Une vraie étape de timbrés… 140 km et pas mal de dénivelé … mais demain c’est journée de repos. Nous visiterons Nikko qui est un petit Kyoto paraît-il.

Jour 20 – Golf de Naagi – Nikko

Jour 20 – Golf de Naagi – Nikko

Petit  restau quand même. ..

Et on se couche cuits.

giteNikko : Stay in Nikko Guest-house ***** 

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