Trouver un hôtel à l'improviste au Japon
Ce matin le lac Toya est lisse comme un miroir, le temps très calme, le ciel encore chargé mais troué de bleu. De grosses carpes orange et blanc tournent tranquillement et irisent la surface. Je me promène un peu comme chaque matin avant le réveil des copains.
Avant de partir nous demandons à un couple d’amoureux sortis du luxueux hôtel qui accueilli le G8 en 2008, de nous prendre en photo tous les trois. Le soleil est timide mais donne l’espoir d’une journée au sec, ce qui complète notre bonheur d’être là.
Nous prévoyons d’arriver le lendemain à Hakodate, au terme de notre périple sur l’Ile d’Hokkaïdo. L’étape d’aujourd’hui fera donc entre 80 et 130km, selon le temps, l’envie et la difficulté du parcours. Nous avons repéré les villages dans lesquels nous pourrons trouver à nous loger : c’est une nouvelle façon de faire, car le « taulier » du jour n’a pas voulu nous aider à chercher un hébergement pour ce soir.
Le départ est très vallonné, parsemé de tunnels heureusement pas trop longs et bien éclairés. Après une quarantaine de kilomètres nous voilà en bord de mer, avec beau temps mais un vent de face plutôt fort. La route longe la mer jusqu’à Yakumo pendant 40 kilomètres. A l’idée de lutter contre ce vent pendant près de 3 heures, nous décidons de tenter de prendre un train sur cette portion car la progression est vraiment difficile, et nous sommes un peu fatigués des 120km d’hier. Malheureusement, à la gare on nous indique que nous ne pouvons prendre le train qu’à condition d’emballer nos vélos dans un sac prévu à cet effet, mais que la gare ne peut nous fournir. Après une rapide mais infructueuse recherche dans le village, d’un marchand susceptible de nous vendre trois sacs, nous sommes contraints de renoncer, et repartons donc à la lutte avec le vent.
Il est encore trop tôt pour nous arrêter dormir au village que nous atteignons au kilomètre 80, et nous continuons donc jusqu’à Mori, au kilomètre 100. Dans ce petit port sont recensés 3 hôtels. La ville est très calme, pas très touristique, et en tout cas nous n’avons pas l’impression que les parkings des établissements soient pleins. Il n’empêche : aucun des trois ne souhaitera nous accueillir, prétextant que l’hôtel est complet.
Il est 17 heures, le soleil commence à disparaitre derrière le petit volcan qui domine la baie, un moment de doute et de solitude nous envahit, avant que ne s’abatte sur nous un sentiment d’urgence partagé… Francis dégaine alors son Smartphone (de toute dernière génération, mais dont on ne fera pas la pub…), lance l’application de réservation d’hôtel mondialement connue (dont on ne fera pas la pub non plus…) et réserve un Hôtel à 20km de Mori, au bord du lac Onuma. Hôtel de standing, assez cher, mais nous n’avons plus le choix. Il book la dernière chambre triple, et nous enfourchons nos vélos, direction la colline qui nous fait face, pour une grosse partie de manivelles… histoire de ne pas arriver complètement de nuit.
9 kilomètres d’ascension plus loin on allume les loupiotes, mais le profile devient descendant.
L’arrivée au bord du lac dans la pénombre est magnifique. La nuit est tombée lorsque nous pénétrons dans le hall du grand hôtel où nous avons réservé. Nous sommes en tenue cycliste, casque sur la tête, sacoche de vélo sous le bras, arborant fièrement notre maillot « Sudvelo / Ne Jetez Plus ! » orange et noir. L’accueil est glacial.
A la réception, l’employé ne veut pas comprendre que nous avons réservé une chambre, sans doute un peu effrayé par cette apparition tardive. Francis sort son smartphone et présente au guichetier l’image de la réservation faite sur Booking, accompagné de son regard le plus sévère et de ses injonctions « Yes ! yes ! look here ! booking yes ! ». L’homme reste insensible aux arguments du Professor mais va quand même chercher son supérieur.
Beaucoup plus ouvert, celui-ci fini par reconnaitre que la chambre est bien réservée pour nous, et nous y accompagne donc… on l’a échappé belle… à cette heure-ci, au bord du lac d’Onuma, la seule possibilité d’avoir un toit, c’était ici…
L’hôtel refusera quand même de nous servir le repas du soir, prétextant être complet… qu’à cela ne tienne nous partons en ville, déserte, certes, mais il y a un petit bar-restaurant ouvert dans la rue principale. Nous nous y attablons pour un excellent repas, dans une très bonne ambiance. Au menu la traditionnelle « soupe Miso » accompagnée de salade et quelques fines tranches de viande de porc et d’une bière Kirin : cela suffit à notre bonheur.
Lorsque nous nous couchons dans la luxueuse chambre triple, la pluie a repris dehors.
Lac Onuma : Hôtel Crawford in Onuma ***
Lire la suite : Une Tour Eiffel contre un Bilboquet